Françoise Bonnavenc
Ma 46ème année sera sanglante ou ne sera pas.
Je viens de pénétrer dans ce sombre club des victimes du cancer du sein.
Je me suis assise, mes projets se sont fracassés au sol, mon futur envolé, le temps s’est suspendu.
La mort s’est immiscée comme une parenthèse temporelle où elle aurait décidé d’en découdre avec ma vie.
Un choc intime, une collision entre un être humain et un diagnostic.
Pas de colère, ni de sentiment d’injustice car au final, pourquoi pas moi…
Pas de tristesse, pas de réel effondrement.
Juste l’appréhension d’un avenir où les attaques physiques vont pleuvoir et qu’il faudra toujours rester armée de courage, de force et d’espoir.
J’avais nombre de choses à faire pour les jours, les semaines et les mois qui viennent et voilà que s’impose une croisade improvisée.
Même entourée et soutenue, même adorée, on est toujours seule, au fond, pour le plus grave que l’on croise et qui nous touche personnellement, une lutte individuelle qui se vit dans sa propre intimité.
Mon temps, mon énergie, mes pensées et mon corps à mobiliser dans l’urgence car le mal sournois a pris beaucoup d’avance…
Je revêts donc mon armure invisible pour mener un combat contre la mort qui restera iréelle tant qu’elle ne sera pas victorieuse.
Il ne faudra jamais que j’oublie de donner des coups de bâton aux troupes engagées quand elles flancheront et de distribuer des plaisirs en récompense aux plus valeureux.
Petite soldate évincée de la stratégie de guerre puisque les généraux sont en blouse blanche, juste bonne à se prendre des coups, se ramasser, et se relever, coûte que coûte.
Avoir confiance en sa petite armée personnelle, la diriger vers la victoire, étape par étape, jour après jour.
On est parti, chacun à son poste, ça va saigner !
Aucun choix ne se pose, je suis loin d’avoir terminé ce que j’ai à vivre ici-bas, et je refuse qu’on me vole tous les bonheurs qui me sont promis.
Je veux voir vieillir mes enfants, je veux voir grandir les petits qu’ils auront, je veux continuer ma plus belle histoire d’Amour, je veux des soleils et des lunes, je veux vivre.
Bonjour Françoise,
Merci pour votre témoignage tellement juste. Ce sentiment de solitude malgré l’entourage bienveillant et cette force qui nous tient d’être là pour voir grandir ses enfants et connaître ses futurs petit-enfants, ce besoin de vivre.
Plein de belles pensées pour vous et votre famille.